Les épreuves du bac se déroulent dans les caves du château de Laval, car les bombes tombent sur la ville. Marie-Joe est contente de son devoir de français. Elle a longuement parlé de Berthe Bernage, l'auteur de la série "Brigitte".
Des années plus tard, en retrouvant des Brigitte, en les relisant avec un regard différent, elle cherchera à comprendre pourquoi elle a tant aimé cette écrivaine...

vendredi 3 août 2007

Guerre 39/45

Voici ce qu'écrivait Pivoine le 31 Juillet...
Ce qui moi me trouble le plus dans les romans de Berthe Bernage qui se déroulent pendant la guerre, c'est, la plupart du temps, l'absence de mention de l'occupant, d'une part, et du nazisme et du régime de Vichy, d'autre part (enfin, ça je le comprends un peu mieux, son propos n'était pas politique, mais ça me fait mal - ce qui me fait mal, y a rien à faire, c'est quand on passe la Shoah sous silence...) C'est finalement dans "Le roman d'Elisabeth" qu'elle va le plus loin en campant ses héros dans la peau de prisonnier de guerre, de résistant, ou de combattants dans l'armée LECLERC. Et pourtant, dans ses romans pour enfants publiés dans "La semaine de Suzette", elle est beaucoup plus "claire" en ce qui concerne la guerre 14-18.
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J'ai repris: "Brigitte aux champs", "sous le ciel gris" et "en ce temps-là"...Une nuit de relecture...déprimante il faut l'avouer...Berthe Bernage résume ces années par ces mots:
"...la première année de guerre...Année parée d'illusions, vivifiée par de beaux espoirs que devait briser tragiquement le printemps 40...
Cinq années lourdes, sanglantes suivirent celle-là. Cinq années : grand morceau de vie pour les gens et pour les nations. Si l'on avait prévu les souffrances qui se préparaient, on aurait dit:"Nous ne pourrons endurer tout cela". Nous avons pu. On peut plus qu'on ne l'imagine."
( Brigitte en ce temps là)
De ces années nous entrevoyons les flots de réfugiés, les difficultés à se nourrir...C'est tout...
Alors je vais laisser tout ceci de côté...Le but de ce blog n'est pas de faire toute la vérité sur Berthe Bernage, de montrer en quoi ses idéaux étaient proches de ceux du Maréchal Pétain...
Parce que le problème est le suivant: on assimile souvent lectrices et auteur...On prête aux unes les idées des autres...J'aime profondément Claudel si souvent cité par B.Bernage , tout en étant athée et profondément "de gauche"...J'aime la force des textes de Claudel, sa poésie, ses personnages sublimes...
Lisez cet article publié par Régine Deforges dans l'Humanité...
"...me revenait le souvenir du manque de livres éprouvé durant mon adolescence..."
Tout est dans ces mots...A une époque où les livres étaient chers, les bibliothèques seulement en villes, la radio peu accessible aux milieux modestes, des revues comme "Les veillées des chaumières" étaient les seules revues féminines...C'était la seule lecture de ma grand-mère maternelle...Et toutes ces femmes n'étaient ni de droite, ni pétainistes...
Mises à part ses propres convictions, je suis sûre que le but de Berthe Bernage était de continuer d'apporter à ses lectrices un peu d'air frais, de rêve...

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Je crois, Mousie, que tu mets le doigt sur la question délicate. Hum, quelqu'un me disait l'autre jour, qu'à Paris, en 40, il y avait 3 millions de Parisiens pour accueillir Pétain. Et qu'en 44, il y avait encore 3 millions de Parisiens pour accueillir de Gaulle. De Gaulle a fait figure de libérateur, qu'il était, mais c'était aussi un peu un autocrate, tout de même.

Il y a tout de même une page dans "Brigitte aux champs" où elle signale les uniformes gris, en marche dans la ville. Je connais d'autres écrivains, très classiques pour l'écriture, franchement d'avant-garde pour la défense de certaines idées, mais tout à fait de droite pour les idées politiques... Qui ont lu Berthe Bernage et qui l'ont prise pour ce qu'elle pouvait donner: c'est de la bonne littérature, mais ce n'est évidemment pas là qu'il faut aller chercher une analyse de la Shoah.

Et elle avait des préoccupations sociales, c'est clair et net, elle en parle assez dans Brigitte, avec Monique, assistante sociale, Luc, prêtre ouvrier, dans Elisabeth, cette jolie jeune fille qui est aussi assistante sociale, dans "La marguerite s'effeuilla" (une des soeurs Abran est assistant sociale aussi).

Je ne sais pas si elle était pétainiste, mais ce que je sais aussi, c'est que les écrivains qui ont continué de publier ont adopté un profil bas, (je pense à Cocteau, par exemple, qui n'a pas eu trop trop d'ennuis, malgré son homosexualité), les autres, les seuls qui étaient réellement des opposants ont publié aux Editions de Minuit ou sont entrés dans la résistance communiste. Et certains y ont laissé leur peau, ex. Desnos.

Je ne pense pas qu'il faille se laisser déprimer par ça. Et de toute façon, c'est clair qu'il n'y a rien de commun entre les lectrices que nous sommes et les bourgeoises de ce temps-là !

(Et après tout, et Céline? Et Drieu la Rochelle ?) :-)

Anonyme a dit…

J'ai eu l'occasion de lire tous les Brigitte, dont ma belle-mère avait toute la collection. Et j'ai été aussi choquée de voir que dans les livres abordant la vie de Brigitte pendant la deuxième guerre mondiale on n'évoque pas le moins du monde les rafles des Juifs ... et qu'après la guerre Berthe Bernage n'en parle pas plus. Difficile de ne pas en tirer comme conclusion que ce silence autour de ce qui au temps où Berthé Bernage ne s'appelait pas encore la Shoah peut passer pour une approbation. d'ailleurs toutes les valeurs affichées par les personnages sont manifestement fort pétainistes...

Djemaa a dit…

Bonjour; je vous félicite pour ces articles! Pascal Djemaa, journaliste.
pascaldjemaa.over-blog.fr

S.Gibert a dit…

J'ai mis la main sur toute une collection de "veillées des chaumières". Berthe Bernage y occupe une place de choix. Elle répond entre autres au courrier des lectrice. C'est souvent savoureux:
http://chroniquesdunpresbytere.com/2013/01/01/la-grande-berthe/